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« La comptabilité carbone est la nouvelle comptabilité financière », mais comment mesurer les émissions de CO2 de votre entreprise ?

Fin 2020, l’entreprise Carbon+Alt+Delete a été fondée : une start-up ambitieuse qui développe des solutions logicielles permettant aux entreprises de mesurer leur empreinte écologique et de pouvoir rendre compte correctement des résultats. Bientôt, les entreprises attacheront autant d’importance à ces données qu’aux résultats financiers, selon le fondateur Kenneth Van den Bergh. Après trois ans, l’entreprise a connu une croissance fulgurante, notamment grâce à son programme Ashoka Impact, qui accompagne les start-up dans la réalisation de leurs projets durables. Une histoire inspirante d’ingénieurs dont la mission, comme son nom l’indique, est de permettre aux entreprises d’éliminer les émissions de CO2 dans le cadre de leurs activités. Dans cet entretien avec le PDG Kenneth Van den Bergh, vous découvrirez le parcours inspirant de cette jeune start-up, devenue à présent une entreprise prometteuse dans un marché en pleine évolution.

Allons droit au but : pourquoi Carbon+Alt+Delete ?

Les entreprises doivent de plus en plus penser à mesurer leur empreinte carbone. Bien qu’il n’y ait actuellement aucune législation en vigueur (hormis pour certains secteurs), les entreprises sont aujourd’hui confrontées à une certaine pression : les institutions financières, les investisseurs, les banques, les clients et même les employés veulent connaître la stratégie de durabilité d’une entreprise avant de collaborer avec elle. La nécessité de pouvoir mesurer les émissions de CO2 est bel et bien présente. Nous avons toutefois constaté que les entreprises ne disposaient pas d’outils appropriés pour mesurer correctement cette empreinte carbone. Carbon+Alt+Delete offre une double solution : l’empreinte écologique est mesurée grâce à un logiciel qui facilite ensuite la prise de mesures rapides.

Comment cela fonctionne-t-il dans la pratique ?

Globalement, notre logiciel offre une solution à trois grands problèmes. Tout d’abord, les émissions réelles de CO2 sont visualisées de façon correcte et transparente. Vous pouvez les comparer avec les outils de comptabilité financière qui permettent de standardiser et d’auditer tous les résultats. Deuxièmement, le logiciel fournit des informations essentielles : où le bât blesse-t-il ? Quelles améliorations pouvons-nous apporter à court terme ? Certains éléments sauteront toujours aux yeux. Enfin, le logiciel permet de gagner beaucoup de temps. Pensez simplement au temps perdu aujourd’hui pour collecter et traiter des données, rédiger des rapports manuellement, etc.

Les entreprises devront-elles rendre compte de leur empreinte carbone de la même manière que de leurs résultats financiers à l’avenir ? Cela va-t-il vraiment si vite ?

De nombreuses choses changent et l’évolution est incroyablement rapide. Les entreprises ne peuvent désormais plus ignorer leur empreinte carbone et leur durabilité. Plusieurs raisons commerciales les poussent à en faire une priorité. Nous croyons dur comme fer que « la comptabilité carbone est la nouvelle comptabilité financière ». Cela signifie plusieurs choses : les entreprises devront mesurer leur empreinte carbone tout comme elles mesurent leurs résultats financiers, au risque de ne plus être en mesure de rester compétitives dans une société neutre en CO2. En outre, elles doivent être en mesure d’en rendre compte à leurs collaborateurs. Pour ces derniers, tout comme pour la comptabilité, ils s’appuieront souvent sur des prestataires externes qui le font au quotidien, qui possèdent l’expertise nécessaire. C’est ce que nous appelons les « comptables carbone ». Et ce sont ces comptables carbone qui peuvent alors avoir recours à notre logiciel.

Un ingénieur qui veut éliminer les émissions de CO2 : ça donne quoi dans la pratique ?

Ce projet ne date pas d’hier. J’ai toujours été passionné par tout ce qui touche à la problématique du climat et plus particulièrement à la transition énergétique. Les deux vont bien évidemment de pair. Même pendant mes études d’ingénieur, cet intérêt m’a toujours accompagné. C’est la raison pour laquelle j’ai décidé d’aborder cette thématique dans mon doctorat, avec une thèse sur la modélisation des systèmes électriques renouvelables. J’ai alors découvert que de nombreux étudiants partageaient ce même intérêt, y compris le cofondateur de mon entreprise, Hanspeter Höschle. Ensemble, nous avons eu l’idée de créer Carbon+Alt+Delete. D’abord en tant qu’ASBL, un outil destiné aux particuliers pour calculer et réduire facilement les émissions de CO2 d’un ménage. Ces ménages pouvaient notamment compenser une partie de leurs émissions de CO2, par exemple en achetant des certificats SEQE. À cette époque, Carbon+Alt+Delete n’était qu’un simple passe-temps. Nous devions encore bien évidemment écrire notre doctorat. Ce n’est que plus tard que nous avons commencé à améliorer le modèle pour répondre aux besoins des entreprises.

Pourquoi ce changement de public cible ?

Ce sont en réalité les entreprises elles-mêmes qui nous ont sollicités. Lorsqu’elles effectuaient des recherches en ligne sur la réduction des émissions de CO2, elles tombaient souvent sur notre site web. Lorsque nous avons reçu de plus en plus de demandes concrètes, nous avons décidé de nous lancer corps et âme dans ce projet. L’année 2020 s’est avérée être le moment parfait, car la pandémie de coronavirus a poussé les chefs d’entreprise à porter un regard critique sur leur entreprise et leur a laissé le temps de mettre en œuvre des processus d’amélioration. C’était un vrai moment charnière, aussi pour nous. C’est au cours de cette période que l’entreprise — ou du moins le plan d’affaires de l’entreprise — est devenue Carbon+Alt+Delete telle que nous la connaissons aujourd’hui. Et c’est durant cette période que nous avons décidé de vraiment nous lancer.

Comment avez-vous abordé ce changement ?

Premièrement, nous avons commencé à chercher quelqu’un qui pourrait nous aider concrètement à développer un logiciel de qualité. Et nous avons certainement trouvé cet expert en la personne d’Hanspeter Höschle – également un ami de l’université. Avec lui, j’ai commencé à me concentrer sur le projet à temps plein en 2020. Les trois autres doctorants qui ont participé à la création du projet ont élaboré avec nous le plan d’affaires du programme Ashoka Impact.

Comment vous êtes-vous retrouvés dans le programme Impact ?

En réalité, cela s’est fait très naturellement. Le moment était bien choisi – la pandémie de coronavirus a créé un climat favorable pour nous permettre d’oser franchir le pas et pour que d’autres entreprises veuillent changer leur méthode de travail. À ce moment-là, nous avons vu un post LinkedIn d’Ashoka et nous nous sommes inscrits. L’approche était globalement la suivante : examinons maintenant de manière approfondie si ce projet en vaut la peine. Et on verra au final s’il tient ses promesses. Et heureusement, il s’est avéré que c’était le cas ! 

Lorsque nous avons lancé le programme Impact, en toute honnêteté, nous étions au tout début de nos recherches. Nous avions une idée approximative en laquelle nous croyions vraiment, mais il y avait certainement d’autres start-up qui travaillaient sur cette question et qui étaient beaucoup plus avancées. Le programme Impact nous a obligés à travailler de façon structurée. Nous avions vraiment besoin d’atteindre des objectifs progressifs, avec des délais pour chaque phase. Cela nous a plu et nous a aussi donné un certain côté « sérieux » en interne que nous n’avions pas auparavant. En fin de compte, presque un an plus tard, nous avions un plan d’affaires concret, nous avons créé une entreprise et, depuis le début de 2021, nous avons connu une progression fulgurante.

Cela me semble une grande évolution en un court laps de temps. Qu’est-ce qui vous a aidés à aller de l’avant ?

Dans le cadre du programme, vous pouvez faire appel à différents experts. Il y a des ateliers avec d’autres participants, mais vous êtes également coaché individuellement. Et bien qu’il existe de nombreux programmes d’incubateurs qui proposent une expertise similaire, ce programme Impact vous propose une combinaison unique. L’expertise est disponible dans le monde des affaires traditionnel, mais aussi dans le secteur à but non lucratif. Une combinaison unique que vous ne trouverez dans aucun autre programme d’incubation. Nous avons ainsi bénéficié d’un coaching sur des questions de financement auprès d’ABN AMRO, posé à Accenture sur des questions liées aux logiciels et à Ashoka nous a fait réfléchir à la participation des différentes parties prenantes de l’entrepreneuriat social. Le tout forme un ensemble harmonieux.

Quels ont été les principaux obstacles ?

Lors nous étions au tout début de notre parcours entrepreneurial, nous en avons rencontré quelques-uns ! Mais je pense que l’élaboration de l’équipe s’est avérée être une pierre d’achoppement majeure. Les fondateurs initiaux de Carbon+Alt+Delete avaient tous un parcours similaire. Nous étions dès lors compétents dans les mêmes domaines, mais aussi moins bons dans les mêmes domaines. Ce n’est que lorsque nous avons trouvé un expert en logiciels que nous avons pu aller de l’avant. Ensuite, bien sûr, il y avait la question du financement : nous avions besoin de fonds pour pouvoir tenir au moins quelques mois. Heureusement, nous sommes tombés sur VLAIO. La demande a été approuvée durant le programme Impact.

Et vous avez remporté le prix Ready to Invest d’ABN AMRO !

Oui, effectivement ! À la fin du programme Impact, une remise de prix est organisée. Les entreprises participantes présentent à nouveau leur projet, qui est bien sûr plus avancé qu’au début. L’un des prix est décerné par ABN AMRO, le prix Ready to Invest (prêt à investir). Et nous avons été les heureux élus ! Concrètement, cela nous a permis de faire encore plus appel à l’expertise d’ABN AMRO pour la partie financement. Ensemble, nous avons aiguisé le pitch avec lequel nous avons fait notre entrée sur le marché. C’était un test en conditions réelles pour nous — le document n’était vraiment pas bon — mais nous avons pu l’améliorer de telle sorte que nous avons réalisé une augmentation de capital de 600 000 € l’été dernier ! Cela nous a permis de passer à la vitesse supérieure : le logiciel a pu être perfectionné et nous avons pu consacrer une partie des fonds à la partie « vente et marketing », ce qui n’est évidemment pas sans importance. Le marché se développe rapidement et nous devons être en mesure d’agir rapidement. Le cycle d’investissement nous a permis de toujours « rester dans le coup ».

Comment voyez-vous l’avenir de Carbon+Alt+Delete ?

Nous voulons devenir un acteur européen de référence en matière de comptabilité carbone. Nous nous concentrons sur le marché européen où nous sommes déjà actifs dans différents pays. À terme, nous visons plus ou moins 200 000 entreprises sur ce marché qui devront rendre compte professionnellement de leur empreinte carbone. Le potentiel est donc énorme. Nous voulons qu’au moins 10 % de ces entreprises travaillent avec notre logiciel. Entre-temps, on constate que des mesures importantes sont également prises en Amérique du Nord au niveau du rapport obligatoire de l’empreinte carbone. Mais pour l’instant, nous nous concentrons logiquement sur notre marché interne.

Pour conclure, êtes-vous (encore) optimiste quant à la lutte contre le changement climatique ?

La réponse à cette question dépend d’un jour à l’autre ! (rires) Quand je lis parfois des rapports de climatologues, il m’arrive d’être assez pessimiste. Le chemin que nous devons parcourir pour garder le changement climatique sous contrôle est parsemé d’embûches et l’urgence est de plus en plus pressante. Mais quand je mets ma casquette d’ingénieur et que je vois la vitesse avec laquelle la technologie progresse et le monde des affaires évolue, je suis déjà plus optimiste. Je suis intimement convaincu que nous pouvons et que nous allons évoluer vers une économie neutre en matière climatique. Mais il reste à voir si nous serons encore dans les temps pour limiter l’impact du changement climatique. Je suis sûr que nous — ou du moins nos enfants et petits-enfants — vivrons dans un monde structurellement plus chaud. Mais j’ai encore l’espoir qu’avec différentes solutions techniques, nous serons en mesure de maintenir un monde viable. Permettez-moi d’exprimer ma plus grande frustration : nous ne parlons que trop rarement de ce qui compte vraiment. Les solutions dont nous disposons sont en réalité nombreuses : il y a les panneaux solaires, les éoliennes, les pompes à chaleur, les voitures électriques, etc. Nous savons ce que nous avons à faire et nous pouvons le faire, mais nous devons nous mettre au travail dès maintenant.

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