NorthSeaChefs prône la pêche durable en mer du Nord

ABN AMRO MeesPierson Belgique a récemment collaboré avec Filip Claeys, chef du restaurant De Jonkman** à Sint-Kruis (Bruges). En 2008, Filip s’est associé à Rudi Van Beylen (Hof ten Damme) pour fonder NorthSeaChefs (NSC), une organisation qui promeut la pêche locale et durable, une noble initiative. La durabilité étant au cœur de nos préoccupations, nous avons voulu en savoir plus. Filip nous parle avec enthousiasme de ce projet qui lui tient beaucoup à cœur.
En résumé
- Comment le projet NorthSeaChefs
- Ll pêche durable

Filip, comment le projet NorthSeaChefs a-t-il vu le jour ?
« L’histoire des NorthSeaChefs remonte à 2006, l’année où j’ai ouvert De Jonkman. Sur le plan gastronomique, j’ai trois grands modèles : mon père, Geert Van Hecke et Sergio Herman. Même si je les trouve fantastiques, je ne voulais pas simplement copier leur cuisine. J’ai donc commencé à chercher une identité propre. Mais ce fut un échec, car inutile de vous dire que l’offre dans ce domaine foisonne dans notre pays.
Tournant au Japon
Pendant ma quête de deux ans, j’ai effectué beaucoup de stages. En Belgique, mais aussi en Espagne et au Japon. Ces stages ont eu un impact important sur moi en tant que chef. À mon retour du Japon, quand je compare la qualité du thon préparé dans ma cuisine avec celle proposée à la criée de Tokyo, je suis dépité. Cela me fait réfléchir à l’origine de certaines espèces de poissons. Pour moi, c’est une évidence : il n’est pas logique de servir à nos clients des poissons pêchés à l’autre bout du monde, alors que la mer du Nord regorge d’espèces en tout genre. Je veux être aussi fier de nos poissons locaux que les Japonais le sont de leur thon. Je décide donc de promouvoir les poissons méconnus de la mer du Nord et de faire de la pêche durable mon identité.
La roussette n’a rien à faire dans un restaurant étoilé
L’idéaliste en moi a trouvé sa vocation, et j’ai la ferme conviction d’être sur la bonne voie. Le saumon et le thon disparaissent alors résolument de ma carte et cèdent la place à la roussette et au tacaud. Mais ma clientèle est moins enthousiaste. ‘Nous ne venons tout de même pas dans un étoilé pour manger de la roussette’, me dit-on sans détours. La clientèle boude le restaurant et je me retrouve face à un choix : soit reprendre mes vieilles habitudes, soit persévérer dans cette direction. Entre-temps, je suis si convaincu de la voie empruntée qu’il n’est pas question pour moi d’arrêter. Mais un restaurant sans clients ne peut évidemment pas durer bien longtemps.

Ce qui est méconnu est malaimé
J’en parle alors avec mon confrère et ami Rudi Van Beylen. Ensemble, nous cherchons la raison pour laquelle les clients, pourtant culinairement assez instruits, ne veulent pas me suivre. La conclusion est que les espèces de poissons proposées ne sont pas suffisamment connues et qu’elles sont donc malaimées du consommateur. Tous les deux, nous entreprenons d’y remédier. Et en allant parler avec des pêcheurs, des biologistes marins, le VLAM, les criées aux poissons et d’autres confrères, le projet NorthSeaChefs prend forme, lentement mais sûrement.
1 kilo de sole, 40 kilos de prises accessoires
Il ressort des discussions menées avec les pêcheurs aux débuts de NSC qu’à l’époque, durant la saison de la sole par exemple, ils retiraient pas moins de 40 kilos de prises accessoires des filets par kilo de sole pêché. 40 kilos de poissons de la mer du Nord qui leur demandent des efforts (les pêcheurs passent souvent quatre à cinq jours par semaine en mer ; ils pêchent 24 h/24 et sortent un filet de l’eau toutes les deux heures), mais pour lesquels ils ne touchent aucune rémunération équitable et qui sont donc immédiatement rejetés dans la mer ! Un chiffre hallucinant qui témoigne d’un grand manque de respect, tant pour le pêcheur que pour les poissons. Entre-temps, nous avons pu renverser la tendance pour certaines espèces, comme le tacaud. Ce mets exquis est désormais disponible dans les poissonneries et même au supermarché et le pêcheur perçoit une rémunération équitable.

L’importance d’une bonne communication
À travers ces discussions et ces échanges de connaissances, nous prenons rapidement conscience que l’histoire derrière ce que l’on fait est très importante pour les gens. Donc, je commence à expliquer à mes clients pourquoi je préfère servir du lieu jaune plutôt que du cabillaud, que la qualité est tout aussi bonne, que nous évitons ainsi que le cabillaud soit menacé d’extinction dans quelques années, que nos pêcheurs rejettent autrement le lieu jaune par-dessus bord alors qu’ils y consacrent du temps et de l’énergie, etc. Pour beaucoup de clients, c’est une révélation. Ils sont intéressés et reviennent pour découvrir des nouveautés.
L’équipe de chercheurs se penche chaque mois sur une nouvelle espèce de poisson
La communauté des NorthSeaChefs s’agrandit. Outre la direction et quelques ambassadeurs comme Gene Bervoets, Axel Daeseleire et Peter Goossens, nous avons une équipe de chercheurs composée d’une vingtaine de membres. Tous les deux mois, ils reçoivent une « blue box » contenant des espèces méconnues, qu’ils étudient. Chaque jour, nous recevons des demandes de chefs de tous horizons qui croient en notre projet et veulent apporter leur contribution.
Sergio Herman s’investit dans NSC Pays-Bas
Cette année, nous avons fait nos débuts aux Pays-Bas. Sergio Herman, qui est aussi un grand partisan du travail avec des produits locaux, dans le respect de l’artisanat de la pêche, s’y investit. L’équipe de chercheurs, composée notamment de Jonnie Boer, Syrco Bakker et Dick Middelweerd, s’est elle aussi mise au travail. Nous sommes convaincus que le projet NSC connaîtra autant de succès aux Pays-Bas qu’en Belgique.
Comment les entreprises ou les particuliers peuvent-ils soutenir les NorthSeaChefs ?
pNorthSeaChefs est une organisation non commerciale ouverte à tous. Les restaurants, mais aussi les poissonniers, les entreprises, les cuisiniers amateurs et autres particuliers, y sont les bienvenus. Notre objectif est et reste de promouvoir les poissons méconnus de la mer du Nord qui sont issus de la pêche durable. Et plus nombreux seront les gens à privilégier ces poissons aux espèces exotiques ou aux espèces surpêchées, plus notre projet sera une réussite.
»Vous trouverez plus d’informations sur NorthSeaChefs.be.