Focus sur la nouvelle Convention Franco-Belge?

En résumé
- Qu'en est-il d'une seconde résidence en France ?
- La taxation des plus-values importantes ?
- La QFIE imputable aura vécu
- Qu'en est-il des artistes et des sportifs ?
La résidence secondaire en France
La règle sur le rattachement de l’imposition des revenus immobiliers est toujours immuable : c’est l’Etat dans lequel le bien est situé qui dispose du pouvoir d’imposer les revenus dudit bien.
Imaginons un résident belge, propriétaire d’une résidence secondaire en France, les revenus immobiliers générés sont imposés exclusivement dans ce dernier Etat et sont donc totalement exonérés d’impôt en Belgique. Remarquons que les revenus immobiliers français doivent cependant être repris dans la base imposable du contribuable belge pour déterminer, en Belgique, la progressivité de l’impôt applicable aux autres revenus. Ce mécanisme consiste à effectuer un calcul d’impôt fictif, comme si les revenus de biens immobiliers perçus en France étaient imposables en Belgique, et de retirer ensuite, de l’impôt fictif ainsi établi, la part se rapportant aux revenus perçus en France. Ce mécanisme permet de calculer le taux applicable à l’ensemble des revenus du contribuable.
La nouvelle Convention apporte à présent un élément de nouveauté en introduisant un critère d’imposition effective : Si le bien est effectivement imposé en France, la Belgique ne peut plus le taxer. Cependant quand est-il si la résidence secondaire en France ne produit aucun revenu dans la mesure où elle ne serait pas mise en location ? En effet, la France ne prélève dans ce cas qu’une simple taxe d’habitation, à l’exclusion de tout impôt sur les revenus fonciers. D’après la nouvelle Convention, en l’absence de cette imposition effective en France, la Belgique récupèrerait son pouvoir d’imposition.
Il convient à présent de savoir si la Belgique va utiliser cette possibilité d’imposer ces biens immobiliers français non mis en location. Il est fort probable que par voie de circulaire, elle renonce à cette éventualité en précisant les raisons. Dans l’intervalle, la question demeure cependant ouverte.
Et si la détention des biens immobiliers français se fait au travers d’une SCI ?
En l’occurrence, il s’agit de la question du sort fiscal réservé aux revenus distribués par des sociétés civiles immobilières (SCI). Ces sociétés sont translucides fiscalement de sorte que leur imposition intervient par un effet de transparence directement entre les mains de leurs associés. Ce sujet a fait l’objet de nombreux atermoiements et controverses au cours des dernières années.
Pour rappel, en 2004, la Cour de Cassation belge avait reconnu que les revenus versés par ces SCI étaient qualifiés de revenus immobiliers conformément au droit français et qu’ils devaient dès lors être exonérés en Belgique, sous réserve de la question de la progressivité de l’impôt.
Malheureusement, en 2016 et 2017, la Cour de Cassation est revenue sur cette jurisprudence favorable aux contribuables aux termes d’un développement juridique qui nous a toujours laissé quelque peu perplexe. En résumé, la Cour de Cassation a estimé que les revenus provenant de droits sociaux de SCI n’étaient finalement pas des revenus immobiliers au sens de la Convention de sorte que la Belgique n’était pas tenue de les exonérer. Se ralliant ainsi à l’administration fiscale belge, les revenus distribués par ces SCI étaient traités comme des dividendes en Belgique et taxés, à ce titre, au tarif de 30 %.
Ces revenus font donc l’objet d’une double imposition (à tout le moins économique) puisqu’ils sont taxés en France au titre de revenus fonciers et en Belgique au titre de dividendes.
A la grande déception de beaucoup, la nouvelle Convention fiscale ne vient pas rectifier cette situation puisque le point 12 du protocole additionnel relatif à la prévention de la double imposition prévoit que la qualification des revenus de SCI s’effectue conformément à la législation interne belge.
D’après nos informations, une commission analyse cette situation. Il est à espérer que la position de la Belgique puisse s’infléchir. En effet, cette double imposition économique contraint la liberté de circulation de résidents français, associés dans des SCI, qui ne peuvent s’installer en Belgique en raison de la double imposition (effective celle-là) de ces revenus et dont les tarifs cumulés d’imposition revêtent un caractère confiscatoire.
Par ailleurs, la nouvelle Convention vient définitivement assoir la position de la jurisprudence du Conseil d’Etat Français (CE 24 février 2020 n°436392) en prévoyant spécifiquement que les plus-values réalisées lors de la vente de parts de SCI sont imposables en France. Il ne s’agit, en l’occurrence, pas d’une nouveauté fiscale mais également d’une confirmation de la position du fisc français depuis une dizaine d’années sur ce sujet.
A ce propos, il convient de remarquer que l’article 13 de la nouvelle Convention dépasse le cadre des simples SCI et vise plus largement la taxation de tous gains réalisés par des résidents belges lors de la vente de participations de sociétés – non côtés- dont les actifs sont constitués pour plus de 50% de leur valeur, directement ou indirectement, de biens immobiliers en France. Ces plus-values sont taxables en France. Ainsi, par exemple, un actionnaire d’une SAS qui qualifierait au sens de l’article précité comme une société à prépondérance immobilière, se verrait taxer en France en cas de plus-value réalisée lors de la cession de sa participation.
La taxation des plus-values importantes ?
Le nouvel article 13 de la Convention prévoit un nouveau régime d’imposition sur les participations substantielles dans des sociétés belges ou françaises lorsque le titulaire de ces participations a transféré son domicile fiscal.
Une participation est considérée par la Convention comme substantielle « lorsqu’une personne morale ou une physique seule ou avec des personnes apparentées, dispose, directement ou indirectement, d’actions ou parts dont l’ensemble ouvre droit à 25% ou plus des bénéfices de la société ».
Dès lors qu’un résident français détiendrait une telle participation substantielle (et pour autant qu’un ensemble de conditions soient remplies), il resterait redevable de l’impôt sur la plus-value mobilière en France si celle-ci était réalisée dans un délai de 7 ans suivant son déménagement.
Cette disposition doit être lue concomitamment avec la disposition interne du droit français de l’exit tax dont le champ d’application est limité à la plus-value-latente figée au jour du départ et expirant au terme d’un délai de 5 ans.
La nouvelle disposition crée donc une forme d’exit taxe en version plus sévère puisque si une cession de participation substantielle devait intervenir dans un délai de 7 ans suivant le déménagement, c’est bien toute la plus-value réalisée qui serait taxable en France (et donc même la plus-value née après le déménagement).
Signalons que cet article n’est pas propre à la Convention franco-belge. On en retrouve une reproduction conforme dans toutes les autres Conventions récemment négociées par la France.
La QFIE imputable aura vécu
Dans un arrêt du 16 juin 2017, la Cour de cassation avait décidé qu’en application de la convention franco-belge - dans sa version de 1967, une quotité forfaitaire d’impôt étranger (QFIE) de 15% pouvait vernir en déduction du précompte belge dû sur les dividendes d’actions françaises.
Après une longue bataille juridique, l’administration fiscale belge avait autorisé, pour l’exercice d’imposition 2021, revenus 2020, que les contribuables belges puisse obtenir la déduction de la QFIE directement via leur déclaration fiscale. Le gain fiscal est relativement conséquent pour le contribuable belge puisqu’il permet de réduire la charge fiscale sur un dividende de source française pour l’année 2021 de 38,96% à 25,88%.
Malheureusement, à partir de l’entrée en vigueur de la nouvelle Convention, cette possibilité d’imputation de la QFIE ne sera plus possible, l’ancienne article 19 de la Convention ayant été modifié.
Dans l’intervalle, les contribuables belges peuvent encore bénéficier de la jurisprudence favorable de la Cour de Cassation en matière de QFIE et ce, jusqu’au 1er janvier 2024, date de l’entrée en vigueur prévue pour la nouvelle Convention fiscale.
Artistes et sportifs
La nouvelle Convention vise également à lutter contre les structurations qui viseraient à créer des sociétés écrans qui percevraient les revenus des artistes ou sportifs pour contourner les règles d’imposition.
Nous le voyons, la nouvelle Convention fiscale apporte indéniablement des modifications importantes sur certaines matières mais également encore quelques incertitudes. Dans un souci d’exhaustivité, il ne nous a évidemment pas été possible d’aborder l’ensemble des nouvelles mesures. Il est conseillé aux contribuables qui entrent dans le champs de cette Convention de faire un examen de leur situation fiscale au regard des nouvelles dispositions qui entreront en vigueur prochainement.
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